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Chanson de la vague
poezii [ ]

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di [Kahlil_Gibran ]

2009-02-20  | [Aestu textŭ lipseashti s-hibâ dghivâsitŭ tu francais]    |  Ânyrâpsitŭ tu bibliotecâ di Guy Rancourt



Le rivage puissant est mon bien-aimé
Et je suis son amante.
Nous sommes enfin réunis par l’amour, et
Ensuite la lune me sépare de lui.
Je vais à lui en hâte et repars
À contrecoeur, avec plein
De petits adieux.

Je pars rapidement de derrière
L’horizon bleu pour répandre l’argent de
Mon écume sur l’or de son sable, et
Nous nous mêlons dans l’éclat en fusion.

J’apaise sa soif et submerge son
Cœur; il adoucit ma voix et soumet
Mon tempérament.
À l’aube je récite les règles de l’amour dans
Ses oreilles, et il m’embrasse avec ardeur.

Le soir je lui chante la chanson de
L’espoir, puis je dépose de doux baisers sur
Son visage; je suis prompte en craintive, mais il
Est calme, patient et rêveur. Sa
Large poitrine apaise mon agitation.

Quand la marée arrive nous nous caressons,
Quand elle se retire, je me laisse tomber à ses pieds dans
La prière.

Maintes fois j’ai dansé autour des sirènes
Quand elles sortaient des profondeurs pour se reposer
Sur ma crête afin de contempler les étoiles;
Maintes fois j’ai entendu les amants se plaindre
De leur petitesse, et je les ai aidés à soupirer.

Maintes fois j’ai taquiné les grands rochers
Et les ai caressés d’u sourire, mais je n’ai
Jamais reçu de rires de leur part;
Maintes fois j’ai soulevé des âmes qui se noyaient
Et les ai portées tendrement vers mon rivage
Bien-aimé. Il leur donne sa force comme il
Prends la mienne.

Maintes fois j’ai volé des gemmes aux
Profondeurs et les ai présentées à mon rivage
Bien-aimé. Il prend en silence, mais je donne
Encore car il m’accueille toujours.

Dans la lourdeur de la nuit, quand toutes
Les créatures recherchent le fantôme du Sommeil, je
Me redresse, chantant un moment et soupirant
L’instant d’après. Je suis toujours en éveil.

Hélas ! L’insomnie m’a affaiblie !
Mais je suis une amante, et la vérité de l’amour
Est forte.
Je suis lasse, mais je ne mourrai jamais.

(Khalil Gibran, Larme et sourire, 1914)

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